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Les Pelleteurs de Nuages
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23 décembre 2012

La caravane humaine

La caravane humaine

 

 

J'ai connu,

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dans ma vie,

qui s'étire déjà pas mal,

quelques grands vivants.

Ils n'étaient pas tous célèbres,

loin de là.

Mais ils avaient tous

assez d'amour dans le coeur

pour en donner

à beaucoup.

Ils n'avaient pas tous un épais portefeuille,

tant s'en faut.

Mais ils avaient tous

une grande passion dans l'âme

qui donnait du sens

à tout ce qu'ils faisaient.

Ils n'étaient pas tous très instruits,

oh non !

Mais ils avaient tous développé

une sagesse en leur esprit

qui en faisait

de merveilleux conseillers.

Ils avaient souffert,

souvent même beaucoup :

maladies, échecs, abandons, trahisons.

Mais jamais,

ils ne s'étaient laissés abattre.

Toujours,

ils avaient rebondi

devant l'épreuve.

Ils avaient compris

depuis longtemps

que donner

est plus agréable que recevoir,

qu'écouter

est plus intéressant que parler,

qu'admirer

est plus utile que condamner.

Ils avaient découvert

que l'intelligence sans le coeur

est bien malcommode

et que le coeur sans les mains

ne vaut guère mieux.

Ils avaient trouvé aussi,

souvent péniblement,

que la vraie vie

ne se vit pas tout seul.

Il y a les autres

sur qui on peut s'appuyer.

Ils avaient tous gardé

un sens de l'émerveillement peu commun.

Capables de se pâmer

devant une rose fraîchement éclose

autant que devant le sourire d'un enfant

ou les mains ridées d'un vieillard.

Ils étaient ardent à l'ouvrage

et fervents pour l'amour.

Ils avaient la force des départs

et le courage des recommencements.

Ils avaient du coeur au ventre

et aussi plein les mains.

Il émanait de leur personne

une sorte de magnétisme

qui donnait le goût

de faire un bout de chemin avec eux.

Leur seule présence inspirait confiance.

Ils dégageaient beaucoup d'amour.

On était bien avec eux.

A les voir,

on avait le sentiment d'être meilleur.

A côté d'eux,

on avait envie de grandir.

Ils avaient du feu

dans les yeux et dans le coeur.

Et certains,

au cours du voyage,

avaient rencontré Dieu

qui avait éclairé leurs pas,

guéri leurs blessures

et réchauffé leurs froidures.

Bref,

ils avaient le goût de vivre

et ils donnaient le goût de vivre.

* * *

Mais j'en ai connu d'autres

qui avaient perdu

ce goût de vivre

et qui traînaient à pas lents

une vie lourde de misères.

Grands blessés,

oubliés, déprimés,

angoissés, perdus.

Ce n'était pas toujours

de leur faute.

Ils ont excité en moi

la pitié,

puis la compassion,

et enfin l'amour.

Je leur ai voué

une bonne partie de ma vie.

Ils sont devenus

des maîtres pour moi

et je compte parmi eux

quelques-uns de mes meilleurs amis.

Et, il faut le dire,

j'en ai connu enfin

qui enlevaient aux autres

le goût de vivre,

qui utilisaient les gens

plutôt que de les aimer.

Mesquins, égoïstes,

ambitieux, hypocrites,

veules, jaloux,

jugeurs, exploiteurs.

Eux aussi

n'étaient pas toujours coupables.

Ils m'ont souvent donné

l'envie de vomir

quand ils croisaient ma route.

Peu à peu, cependant,

ils m'ont appris

la compréhension, la bonté

et surtout le pardon.

* * *

Dans la caravane humaine,

il y a toutes sortes de marcheurs.

Des leaders et des suiveurs,

des infatigables et des fatigués,

des joyeux et des tristes,

des bons vivants et des agressifs,

des grands, des moyens, des petits,

des fins et des pas-fins,

des forts et des faibles...

Les uns courent,

d'autres s'essoufflent à rien,

d'autres s'assoient sur le bord de route,

d'autres enfin rebroussent chemin.

Mais tous sont portés ou emportés

par cette marée humaine.

Tous, même sans le savoir,

sont avides d'amour,

sont assoiffés de vie.

Ils veulent VIVRE.

Ils portent en eux,

comme le trésor le plus précieux,

cet acharnement à vouloir vivre.

Qui leur a rivé au coeur

ce goût de vivre,

dites-le moi ?

Je ne serais pas surpris que ce soit

Celui qui est la Vie,

Celui qui a brisé

les chaînes de toutes nos morts

afin que nous puissions

VIVRE TOUJOURS !

 

Jules Beaulac, Que c'est bon la vie !, Ed. du Levain, l990

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